Gouffre des Grenouilles
Développement : 322 m
Dénivellation : 191 m (-188 m ; +3 m)
Le gouffre des Grenouilles s’ouvre sur le versant Nord du Bargy, tout comme la grotte de l’Envers (3500 m ; -487 m) explorée quelques années plus tôt par la même équipe. Comme dans cette dernière, il n’a pas été possible d’atteindre le fond du synclinal de Cénise où est censé couler le collecteur du massif.
Situation de la cavité :
Commune : Mont Saxonnex.
Coordonnées : X = 922.31 ; Y = 2122.34 ; Z=1530 m.
Développement : 322 m
Dénivellation : 191 m (+3 m,-188 m)
Accès : Du village, monter au lac Bénit. Laisser à gauche
la buvette pour prendre la direction du col d’Encrenaz. Au bout du lac,
prendre la prairie à droite et suivre le sentier qui monte à
droite du grand pierrier. Bientôt, vous arrivez sous la falaise. Vous
êtes au pied des couches verticales qui forment la retombée du
pli anticlinal du Bargy. Attention aux chutes de pierres !
Les avalanches ont accumulé un grand névé qui subsiste
quelquefois jusqu’en été. Il est conservé par son
exposition au nord et par les courants d’air froid sortant des cavités
situées au pied de la falaise.
Description de la cavité :
Le gouffre des Grenouilles se développe dans les strates quasi verticales correspondant à la retombée de l’anticlinal formant l’ossature du Bargy.
Le passage bas à l'entrée du gouffre des Grenouilles, vu de l'intérieur.
L’entrée insignifiante (0,8 x 0, 6 m) donne accès
à une base de puits encombrée de gros blocs plus ou moins stables
(trémie). Derrière, une première désobstruction
rejoint un puits de 8 m surmonté d’une cheminée. Un second
rétrécissement (désobstruction) rejoint le sommet d’un
P.6 aussitôt suivi de 2 verticales de 18 et 11 m. Les proportions s’étoffent
nettement. A -40 m, une arrivée d’eau et d’air provient
du haut de l’inter strate et communique probablement avec le flanc du
massif qui reste assez proche. Au bas du P.11, un petit décrochement
nous fait changer de strate et communique avec un beau puits coupé
à mi-hauteur par un palier formé de gros blocs (P11 + P.18).
Au bas, la pente s’adoucit et le conduit prend la forme d’un gros
méandre glaiseux et entrecoupé de petits ressauts. A -100 m,
l’argile a presque complètement colmaté le conduit et
seul un étroit soupirail permet de gagner la suite. Après cette
étroiture on parvient au bas d’une première cheminée
arrosée. Il faut franchir un second passage étroit pour accéder
à un nouveau puits, lui aussi surmonté d’une cheminée.
Celui-ci s’ouvre sous de gros blocs et plonge sur 40 m jusqu’à
un large palier qui se déverse aussitôt dans une seconde verticale
de 38 m. En crue, ces deux puits, pourtant spacieux, sont fortement arrosés.
Au bas (-188 m), le sol de graviers et de blocs lavés colmate presqu’entièrement
la suite. Un très léger courant d’air s’échappe
d’une étroite fissure mais celui-ci n’est sans aucune mesure
comparable au courant d’air constaté à l’entrée.
Une bonne partie de ce dernier doit probablement provenir de l’affluent
de -40 m.
L’amorce d’un conduit fossile supérieur est elle aussi
rapidement impénétrable. Il est à noter qu’à
cette profondeur, on se situe une centaine de mètres sous le lac Bénit
et 250 m sous le fond de la grotte de l’Envers.
Joël Palissot (Pépé) au sommet du P.11.
A proximité du gouffre, une entrée haute de 3
m au dessus d’une petite escalade facile de 2 m laisse s’échapper
un curieux ronflement qui fait penser à un écoulement d’eau.
Ce bruit est produit par un violent courant d’air sortant par un trou
gros comme deux doigts au raz du sol. Une désobstruction difficile
en pleine roche est possible.
Vingt mètres plus haut, se trouve un autre gouffre de 15 mètres
de profondeur, parcouru lui aussi par un courant d’air. Une désobstruction
a été commencée sur 2 m (SAC), elle se trouve 3 m au
dessus du fond du puits.
Historique des explorations :
Lundi 4 août 2003
Participants : D. Boibessot, P. et S. Degouve
Nous montons en pleine chaleur au début de l'après midi pour
aller voir des cavités repérées par Dom et qui soufflent
abondamment. Celles-ci s'ouvrent sous le col de l'Encrenaz, juste en face
du lac Bénit. Comme promis, le courant d'air est d'une rare violence.
Après un passage bas, une haute diaclase encombrée de blocs
inquiétants butte sur des passages étroits peu engageants. Heureusement,
la désobstruction d’un passage bas nous permet de contourner
l’obstacle et finalement, nous nous retrouvons au bord d'un puits barré
par une diaclase impénétrable sur 1 à 2 m. Tout le courant
d'air vient de là.
TPST : 5 h
Mardi 5 août 2003
Participants : D. Boibessot, P. et S. Degouve.
Retour à la grotte sous un soleil de plomb. Heureusement, Pierre, le
propriétaire du refuge du lac Bénit nous monte le matériel
en 4x4. Le courant d'air est toujours aussi violent et glacial. Nous parvenons
à franchir le passage étroit. Celui-ci communique avec un puits
en diaclase de 7 à 8 m de profondeur. Au bas, la suite est très
étroite et nécessite de nouveaux travaux, mais en lançant
des cailloux, on devine à quelques mètres de là, un ressaut
de 2 à 3 m et tout le courant d'air en sort.
TPST : 6 h
A - 15 m, le gouffre prend de l'ampleur et emprunte une interstrate quasi verticale.
Vendredi 3 octobre 2003
Participants : D. Boibessot, P. et S. Degouve
La météo n'est vraiment pas très réjouissante.
Il pleut abondamment. Malgré cela, le trou souffle encore très
fort. Dedans, l'eau ruisselle de partout, et au fond de la fissure, nous entendons
très distinctement le bruit d'un ruisseau. En jetant des cailloux,
nous parvenons à sonder un premier puits d'une dizaine de mètres,
mais le cours d'eau semble plus loin ou plus bas. Tout cela est très
motivant. En deux heures, nous parvenons à dégager les gravats.
Dom s'enfile dans le méandre et parvient presque à gagner le
sommet du puits. Le froid est mordant et l'humidité n'arrange rien.
Nous préparons un nouvel assaut et ressortons vers 18h00.
TPST : 5 h
Jeudi 9 octobre 2003
Participants : D. Boibessot, P. et S. Degouve.
Le tir de la semaine passée a été efficace, mais il en
faudra au moins deux autres avant d'atteindre le puits. Nous vidons les gravats
et parvenons à avancer d'un bon mètre. Dom ne résiste
pas à l'envie d'aller voir plus loin. Laissant son baudrier il s'enfile
dans le méandre et force un peu... beaucoup et ça passe. Il
a la tête au-dessus du puits mais maintenant il faut revenir. Et là,
ça se gâte. Le trou est froid et les épaisseurs multiples
de vêtement bouchonnent sérieusement. Dom nous annonce froidement
qu'il ne parvient pas à repasser l'étroiture. Seule solution,
enlever une couche. Dans un méandre de 25 cm de large, la scène
est assez coquasse. Après les bottes, nous voyons Dom se transformer
en contorsionniste pour enlever sa combinaison. Derrière, j'essaie
de récupérer les affaires. Finalement, ça passe, mais
l'avertissement a été sérieux surtout que la température
de la grotte ne permet guère les attentes prolongées... Dans
la foulée, nous effectuons une nouvelle frappe.
TPST : 5 h
Le puits de 6 m juste après la désobstruction de -10 m.
Mercredi 15 octobre 2003
Participants : P. et S. Degouve
Nouvelle séance de désobstruction, nous voyons enfin le bout
du tunnel.
TPST : 4 h
Jeudi 16 octobre 2003
Participants : D. Boibessot, P. et S. Degouve.
Le brouillard encercle toujours le Bargy. Nous montons à l'aube et
nous entrons dans le trou vers 9 h. La désobstruction ne prend guère
de temps et en moins d'une heure le passage est ouvert et très praticable.
Cinq mètres plus bas, nous arrivons au sommet d'un beau puits de 15
m. Un court méandre amène à la verticale suivante (7
m). Nous nous succédons pour équiper et pour profiter au mieux
de la première. Après deux autres puits, nous parvenons à
un passage bas que nous agrandissons. Derrière c'est plus grand et
le conduit plonge dans une nouvelle série de ressauts (-83 m). Nous
n'avons presque plus de corde et de toute façon nous avons promis à
Pépé que nous ne ferions qu'une courte reconnaissance. Nous
remontons en faisant la topo...
TPST : 6 h
Lundi 10 novembre 2003
Participants : D. Boibessot, G. Choupin, P. et S. Degouve,
L. Langlet, J. Palissot
Nous partons cette fois-ci avec pas moins de 250 m de corde et une solide
équipe. La neige fond un peu mais ce n'est pas la crue. Avant d'entrer
dans le gouffre, vers 9 h 30, nous nous prêtons aux caméras d'un
cinéaste de Mont Saxonnex qui entreprend un film sur les grottes du
Bargy. Nous ne tardons pas à nous retrouver à notre terminus
à -74 m. Sandrine, Gilles et Laurent partent devant et équipent.
Patrick suit en faisant de la Photo, et Dom et Pépé dressent
la topo. Après un premier puit de 7 m, la galerie plonge à 45°
jusqu'à un second petit puits au fond duquel coule un petit ruisseau.
La suite est impénétrable mais juste au-dessus de ce dernier
cran vertical, une galerie glaiseuse semble se prolonger. Nous la parcourons
sur une vingtaine de mètres jusqu'à un remplissage argileux
qui bouche presque entièrement le conduit, mais qui laisse toutefois
passer un très net courant d'air soufflant. Sans grandes illusions,
nous entamons une désobstruction avec les moyens du bord : marteaux,
clefs de 13, descendeur et même la poignée d'une gamelle y passe.
Nous avançons assez difficilement car la glaise est collante mais peu
à peu une suite se dessine et bientôt, nous discernons un conduit
plus vaste avec un bruit de cascatelle. Nous nous relayons sans relâche
durant plus de 5 h, et finalement Dom parvient à passer. De l'autre
côté, il a plus de facilité pour aménager le passage.
Une heure plus tard, nous nous retrouvons tous dans un élargissement
surmonté d'une belle cheminée. Un second passage argileux nous
offre moins de résistance et derrière, nous sommes à
nouveau au pied d'un puits qui amène pas mal d'eau. En face, il n'y
a pas de suite visible. En revanche, au sol, un beau puits s'ouvre entre les
blocs. Un sondage au caillou nous incite à penser qu'il s'agit d'une
verticale de 20 m au moins, suivie probablement d'une seconde aussi haute.
Mais il est trop tard pour se lancer dans l'équipement de ces puits,
d'autant plus qu'ils arrosent copieusement. La désobstruction nous
a cassé les bras et nous sommes couverts de boue. Nous remontons donc
tranquillement et vers 20 h 30 nous sommes dehors.
TPST : 11 h
Le P.11 à -50 m.
Dimanche 23 novembre 2003
Participants : D. Boibessot, G. Choupin, S. Collomb-Gros, P.
et S. Degouve, L. Langlet, J. Palissot.
Le gouffre est nettement moins humide que la fois précédente.
Pendant que Patrick commence l'équipement du puits terminal, Dom et
Pépé dressent la topographie, Seb agrandit les étroitures
et Sandrine et Gilles conditionnent le matériel. Le puits arrose un
peu mais l'équipement permet d'éviter le gros de la douche.
Trente huit mètres plus bas, un palier ébouleux se déverse
dans une seconde verticale estimée à une quarantaine de mètres.
En raison des embruns, le lasermètre ne passe plus. Le puits est beaucoup
plus arrosé mais en pendulant dans l'angle d'une diaclase nous parvenons
à éviter la douche. Au fond, la suite n’est guère
réjouissante. Au point bas, un boyau encombré de blocs devient
vite impénétrable. Juste au-dessus, une diaclase étroite
semble se prolonger sur plusieurs mètres, mais malgré une désobstruction
acharnée dans un talus d'argile celui-ci reste impénétrable
sans grands travaux. Au bout de deux heures de recherches il faut se résigner.
Dans le doute, nous laissons équipé pour revoir le secteur avec
un peu plus d'air, puis nous ressortons tranquillement.
TPST : 7 h
L'équipement du P.18
Lundi 22 novembre 2003
Participants : D. Boibessot, P. et S. Degouve
Il continue de faire un froid de canard et le peu de neige tombé ne
fond pas. A l'entrée du gouffre, le courant d'air aspirant est très
net et tout le début de la cavité est très sec. Cela
nous change un peu des conditions humides que nous avions lors des désobstructions.
Même le boyau argileux, vers -100 m, est beaucoup moins gras. Dans les
deux puits terminaux, il tombe une petite pluie fine très localisée.
Au sommet du dernier P.40 (-145 m), Dom part avec le perfo pour aller voir
une lucarne, un des derniers points d'interrogation du gouffre.
Malheureusement il ne s'agit que d'une petite cheminée parallèle
sans suite. Alors nous commençons le déséquipement. Au
sommet des derniers puits, Patrick fait une escalade en artif de 6/7 mètres
pour atteindre un départ. En fait, il s'agit de l'amont des puits qui
se prolonge en hauteur par une diaclase impénétrable et une
cheminée sans suite évidente. Il ne resterait donc plus qu'à
voir la diaclase vers -40 m, mais si le courant d'air semble bien provenir
de celle-ci, en revanche elle paraît très difficilement pénétrable.
De plus, il est fort probable qu'elle communique rapidement avec la surface.
Ce sera pour une prochaine fois... Nous terminons le déséquipement
et sortons du gouffre avant la nuit.
TPST : 6 h
A -70 m, la pente s'adoucit et le conduit prend l'allure d'un méandre glaiseux entrecoupé de ressauts.
Bibliographie :
- C.A.F. Albertville (2003) : Compte rendu chronologique des activités 2003, p. 5
< Télécharger la topographie du gouffre des Grenouilles -
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