Torca de los Copetes

(n°440, 3431, 3432, 3438, 3440)

Développement : 910 m
Dénivellation : -216 m

La torca de los Copetes se situe au sud de la chaîne calcaire qui s'étend de la peña Lusa jusqu'aux limites sud de la province, matérialisées par la ligne de crête qui, de l'alto de Imunia rejoint le col de la Sia. Rappelons que cet ensemble constitue un karst indépendant de celui de la Gándara bien que situé juste au-dessus. Entre les deux, un épais banc de grès (grès de la Brena d'une puissance de 90 à 100 m) joue le rôle de niveau de base aux écoulement rencontrés dans la cueva del Lobo, et son prolongement, la cueva de Gorgullones, mais également dans le collecteur de la torca de la Peña del Trillo situé plus au sud. Compte tenu des fractures ouest-est qui découpent le massif en compartiments bien identifiés il y avait de fortes probabilités pour qu'un troisième drains existe dans celui situé le plus au sud, entre le vallon de Valdecarneros et celui de Malmada. Le secteur avait déjà été bien fouillé par différents groupes : le S.C. Dijon dans les années 80 puis plus récemment (années 90 et 2000) par des groupes Madrilènes (GER, GEODA et Alfa). Mais curieusement, la torca de los Copetes (initialement cueva 440) n'avait pas retenu l'attention de ces différentes équipes qui l'avaient pourtant répertoriée sous le numéro TR 15. Nous l’avions repérée en 1987 lorsque nous explorions le réseau de la cueva del Lobo puis en 1991, mais compte tenu de l’altitude, nous avions imputé le fort courant d’air soufflant aux seules entrées supérieures qui jalonnent la galerie d'entrée. Mais il fallait quand même en avoir le cœur net et il aura fallu attendre 30 ans pour que nous y retournions et constations qu’il existait une autre origine à ce courant d’air violent et glacial sous la forme d'un méandre encombré de blocs. Après quelques aménagements dans ce dernier nous avons finalement pu accéder à une série de puits rejoignant vers -200 m un niveau de galeries parcouru par un ruisseau souterrain.

Situation et accès

Coordonnées de la cueva 440 (entrée principale) également marquée TR 15 :

x : 451,48 ; y : 4778,735 ; z : 1215 m (Coordonnées UTM 30 T – ED 50 - GPS)
Commune : Soba

Les différentes entrées (6) s'ouvrent en rive droite du vallon qui longe le flanc nord del monte de Valdecarneros.

Entree

Quelques entrées de la torca. Celle qui est juste dérrière les personnages
(de gauche à droite : J. M. Duché, S. Degouve, Ph. Mathios) est l'entrée principale (n°440).

Description

La plupart des entrées de la torca (n°440, 3431, 3432) s’ouvrent sur un niveau de conduits fossiles qui longent sensiblement la bordure nord de la peña de Valdecarneros et à des altitudes avoisinant les 1200 m.. Ces galeries, parfois amples, sont bien formées et correspondent probablement à des circulations anciennes peut-être antérieures au creusement du vallon et étroitement liées à la présence des glaciers. La cueva del Meandro située juste en vis-à-vis des entrées de la torca, mais sur l’autre versant du vallon pourrait conforter cette hypothèse. Plusieurs gouffres (n°3440 et 3438), situés également sur la bordure du versant, mais une trentaine de mètres plus haut, se greffent sur ces galeries. Contribuant au violent courant d’air qui sort au niveau des entrées basses, ils ont détourné notre attention lors des premiers explorations. En effet, nous avions un peu trop hâtivement assimilé cette cavité à sa voisine la cueva del Meandro, considérée comme un phénomène local sans lien véritable avec le karst profond. Cette erreur a conduit à négliger un petit diverticule fortement soufflant situé au point bas des conduits décrits précédemment.

En 2022, lors d’une nouvelle visite dans les galeries de la cueva 440 ce détail ne nous a cette fois-ci pas échappé et la visite du petit méandre qui se profilait sous la salle nous donna accès à une succession de puits.

galeriesEntree

Dans les galeries d'entrée de la torca. Le creusement de ce niveau fossile
semble antérieur à celui des puits et du réseau profond.

Les galeries d’entrée

L’accès le plus commode se fait par la cueva 440. Un passage bas suivi d’une rotonde et d’un soupirail désobstrué en 1987 débouche dans une galerie confortable se poursuivant en amont comme en aval. L’amont se prolonge par un méandre entrecoupé de petit ressauts et terminé une quarantaine de mètres plus loin par un puits remontant bouché par des blocs. Sur le côté et en vis-à-vis du soupirail, plusieurs ouvertures rejoignent la base d’un puits (22 m) communiquant avec la surface (Torca 3340). En aval la voute s’abaisse très ponctuellement au niveau d’un passage qui a été désobstrué. A cet endroit, l’éboulis pentu se déverse dans une salle assez vaste (30 m x 8 m) bouchée à son extrémité par une trémie. Au plafond, on peut deviner l’arriver d’un méandre discret provenant de l’entrée 3432. Dans cette salle, plusieurs ossements ont été découverts. Il pourrait s’agir d’ours comme l’atteste la présence de plusieurs bauges.

SalleOssements

La salle des Ossements dans la zone d'entrée de la torca.

Les puits

Au bas de cette salle, un étroit méandre caractérisé par un courant d’air violent et glacial (5,4°C), s’enfonce de quelques mètres avant de rejoindre le sommet d’un premier puits de 25 m. Celui-ci recoupe à mi-hauteur un niveau de galeries qui pourrait être en rapport avec les conduits ébouleux rencontrés à l’extrémité des autres galeries du niveau de l’entrée. A partir de là, les verticales s’enchaînent et quelques arrivées latérales contribuent à l’agrandissement du conduit : P.21, P.7, P.3, P.20, P.29, P.5, P.9. A -140 m, les parois se resserrent sur un méandre légèrement plus étroit et encombré de gros blocs. Une nouvelle descente de 7 m précède un puits beaucoup plus vaste de 25 m dont la base recoupe un ruisseau provenant d’un conduit se terminant rapidement sur deux cheminées (environ 30 à 35 m). Celle de droite est parcourue par un ruisseau.

puits

Au sommet du P.25, dernier puits de la série (-145 m).

La rivière des Moulins

Le méandre qui suit est entrecoupé de 2 petits ressauts de 4 et 6 m mais le conduit est désormais subhorizontal, accusant une pente moyenne d’une dizaine de degrés. De belles banquettes facilitent la progression jusqu’à un carrefour important (-185 m). A partir de celui-ci la progression se fait dans le lit du ruisseau et dans une galerie encombrée de remplissages glaciaires. En amont du carrefour la galerie remonte de façon soutenue jusqu’à une autre confluence. Les deux branches de cette dernière ont été reconnues sur quelques dizaines de mètres chacune. La première s’arrête au bas d’une trémie (-150 m) tandis que la seconde semble se poursuit en hauteur par une première escalade de 10 m. Elle est suivie d'une galerie en forte pente interrompue de nouveau par un ressaut de 6 m constitué de gros blocs menaçants. Au-dessus une salle beaucoup plus grande correspond à l'arrivée de puits dont la hauteur a rété sondée à plus de 40 m (salle du Bilboquet). L’essentiel du courant d’air provient de ces arrivées.

En aval, le ruisseau circule sur un remplissage formé de galets gréseux arrachés au banquettes témoin qui bordent le conduit. La progression est agréable et quelques belles coulées stalagmitiques ornent par endroit les parois.

coulée

La variété des remplissages dans la rivière des Moulins.
Sur la droite, au-dessus de la belle coulée blanche, on distingue les vestiges d'un remplissage glaciaire qui devait colmater presqu'entièrement le conduit.

A -215 m la galerie se dédouble. La voûte du conduit principal s’abaisse progressivement jusqu’à rendre la suite impénétrable. Il n’y a pas d’air. En revanche, en grimpant de quelques mètres, on retrouve un joli méandre fossile. Après avoir serpenté sur une vingtaine de mètres, celui-ci devient de plus en plus étroit jusqu’à devenir impénétrable. Ici aussi, le courant d’air est totalement absent.

Moulins2
Moulins-1

Quelques aspects de la rivière des Moulins

Climatologie

La cavité est parcourue par un puissant courant d'air froid (5,4 °C) qui n'est pas sans rappeler ceux rencontrés dans les cavités de la Lusa (Lobo, torca Fria...). Comme pour ces dernières on peut s'étonner de trouver des courants d'air soufflants (régime estival) dans ce qui semble être des entrées hautes du réseau. En ce qui concerne la torca de los Copetes, il semble que ceux-ci proviennent des cheminées situées en amont et plus à l'ouest. L'air pourrait alors provenir d'entrées encore inconnues s'ouvrant plus haut en altitude (il reste un potentiel de 200 m) et sur le versant opposé (ouest). Cela laisserait aussi à penser qu'il n'existe pas de sortie notable plus bas dans le massif. La présence d'importants dépôts d'origine glaciaire pourrait expliquer en partie le fait que nous n'en n'ayons pas trouvé.

Géologie, hydrologie

Entre le réseau de la peña del Trillo et celui de la torca de los Morteros il est probable qu’il y ait un drain similaire à ceux qui ont été découverts plus au nord (Lobo, Trillo). Le ruisseau découvert au fond de la torca de los Copetes peut en partie palier cette absence même si pour le moment son envergure reste modeste. Les recherches se poursuivent plus au sud avec l'espoir d'atteindre une circulation plus conforme à l'étendue du bassin d'alimentation. Quoiqu’il en soit, la présence de ce ruisseau pose une nouvelle fois la question des circulations sous cette partie du massif et notamment celle des résurgences. Des traçages multiples seraient à mettre en œuvre dans chacune des cavités, un très gros chantier en perspective...

carteCopetes

Carte spéléologique des cavités de la Peña Lusa et de l’alto d’Imunia
La torca de las Copetes, sans avoir l’ampleur des réseaux voisins, constitue de 4 ° drain des cavités de ce secteur.
Dans l’état actuel des connaissances il est bien difficile de savoir où résurge le ruisseau rencontré au fond de la torca.

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Historique

Les différentes entrées sont repérées par le S.C. Dijon en 1988 lors des explorations menées dans la cueva del Lobo.

Le 14 juillet 1991, le P.20 de la cueva 2432 est ouvert et rejoint la salle des Ossements. Le boyau souffleur est signalé mais ne retient pas vraiment notre attention (C. Besset, Patrick et Sandrine Degouve, F. Jovignot, V. Millet).

Le 29 juillet 1993, le puits est à nouveau descendu et plusieurs désobstructions sont tentés dans la salle des Ossements (S. Degouve, C. Lefebvre, N. Dusapin)

Il faudra attendre le 16 juillet 2022 (soit plus de 30 ans) pour que nous retournions dans la cavité. Nous en dressons la topographie mais surtout nous sommes convaincus que la suite se trouve au delà du boyau souffleur et qu'il s'agit là d'un objectif bougrement intéressant (P. et S. Degouve, Jean-Marc Duché, Philippe Mathios). Deux jours plus tard, le boyau est franchi après quelques aménagements dans une ambiance glaciale. La température du violent courant d'air parcourant le conduit est de 5,4° imposant des petits retours au soleil où le mercure dépasse les 30°. L'exploration s'arrête rapidement au bord du premier puits (P. et S. Degouve). Il faudra une seconde séance le 20 juillet suivant pour améliorer le passage et sécuriser la tête du puits menacée par un énorme bloc instable (P. et S. Degouve).

La descente des puits commence le 2 août et ceux-ci sont explorés jusqu'à 80 m (P. et S. Degouve, B. Pernot). Le lendemain la profondeur de 170 m est atteinte, arrêt sur un petit puits dans un beau méandre parcouru par un ruisseau (P. Degouve, B. Pernot).

meandre

Le méandre d'accès à la rivière des Moulins.

Le 5 août suivant le ressaut est descendu suivi d'un autre de quelques mètres également. L'équipe, qui s'est bien étoffée, découvre le ruisseau des Moulins qu'elle explore jusqu'à la profondeur de 216 m. La suite vers l'aval n'est pas très évidente, quant à l'amont, si le courant d'air y est bien présent, il semble plutôt remonter vers des bases de puits (P. et S. Degouve, J.M. Duché, Ph. Mathios,B. Pernot).

Nous y retournons le 20 avril 2023 afin de réaliser les escalades en amont de la rivière des Moulins. La progression est de courte durée et après 2 remontées le long d'éboulis instables, la progression s'arrête à la base de vastes puits remontants (P. Degouve, A. Lorenz, B. Pernot, D. Vidal).

La dernière sortie a lieu le 20 juillet 2023. L'amont du ruisseau est atteint à partir d'une traversée dans le puits de 25 m (-145 m), sans grande surprise, il se poursuit par des puits remontants. Quelques galeries latérales sont également vues dans les puits d'entrée. Le gouffre est déséquipé (P. Degouve, A. Fuentes, Ph. Mathios, B. Pernot).

Bibliographie principale

- DEGOUVE DE NUNCQUES, Patrick ; SIMONNOT, Guy (1991) : La cueva del Lobo et le karst de Pena de Lusa - Sous le Plancher 1991 n°6, p.53
- DEGOUVE DE NUNCQUES, Patrick et Sandrine (2022) : La torca de los Copetes (n°440) - Porracolina 2022 (G.S.H.P. de Tarbes et S.C. Dijon), p.47-51


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