L’été débutait dans la grisaille et juillet, classiquement sec et ensoleillé, annonçait une saison maussade. Finalement, ce fut août qui nous offrit les plus belles journées avec quelques séquences de canicule et une sécheresse qui perdure toujours. Du coup, avec un effectif allégé cette année nous en avons profité pour faire la chasse aux courants d’air que ce soit sur ou sous terre. Dans certains cas, ces recherches ont initié de véritables chantiers de désobstruction, dans d’autres cas, elles nous ont permis de découvrir des prolongements dans des réseaux connus. Voici donc un petit tour d’horizon de nos activités estivales qui ont représenté pas moins de 30 journées consacrées à la spéléo.
Sur l'arête des Mazos de Helguera, au nord du réseau de la Gandara. Au fond, les lapiaz du Mortillano.
Prospections au-dessus de la cueva del Gándara
Cette année, nous avons mené plusieurs prospections au nord du réseau, à la fois pour positionner des cavités connues mais aussi pour trouver de nouvelles torcas dans certains secteurs peu fouillés. Bien sûr, ce fut le cas, mais aucune d’entre elles ne s’est révélée très intéressante. Par ailleurs, la végétation de plus en plus envahissante rend certains accès difficiles et en plus du descendeur il faut désormais prévoir un sécateur dans le sac à dos..
Le lapiaz d'Helguera est percé de profondes dolines alignées sur des fractures est-ouest, comme celles qui dirigent le réseau de la Gandara en aval de l'Ojón.
Au sud du réseau, du côté du portillo de Lunada, nous avions entamés des désobstructions en 2011 dans des trous susceptibles de rejoindre la rivière de la Salamandre dans l’amont du réseau. Pas de grande découverte de ce côté-là non plus ; des trémies et des boyaux impénétrables ont eu raison de notre obstination. Etant dans le secteur, nous en avons profité pour tenter de réunir la perte des Plastiques avec le sumidero de Lunada et la torca Fulm. Deux bonnes centaines de mètres ont été explorés mais la jonction pourtant toute proche n’a pas été réalisée.
La perte des Plastiques s'ouvre une cinquantaine de mètres en amont de la perte de la Lunada (3045 m, -338 m).
Espoirs déçus à la Sota
Les cavités du cirque de la Sota, faisaient figure de vieux serpents de mer dont on parlait à intervalle régulier, sans jamais véritablement passer à l’acte. Il y avait bien eu des tentatives de désobstruction en 1973, puis en 1981, 1985, 1993, 2005. A raison d’une sortie tous les dix ans, les étroitures qui terminaient ces petites cavités n’avaient pas grand-chose à craindre. Pourtant l’objectif méritait de s’y atteler sérieusement en raison d’une situation géologique particulièrement favorable (au fond d’un superbe cirque glaciaire) et d’un courant d’air dont le ronflement au fond de la cueva del Circo avait fait croire un instant à Claude Mugnier qu’il s’agissait d’une rivière. Seul petit problème, le cirque est à 2 h de marche…
Le cirque de la Sota, au fond de Rolacia et sous le sommet du Carrío, est un magnifique cirque glaciaire aux formes presque parfaites.
Après une première reconnaissance en juin pour évaluer les travaux, nous remontons à 3 (Guy, Sandrine et Patrick), avec, cette-fois-ci, du matériel sérieux pour franchir les passages récalcitrants. La cueva 338 semble être la plus simple à agrandir, mais c’est dans la cueva del Circo que le courant d’air est le plus violent. Quelques pailles dans la première nous permettent de progresser d’une dizaine de mètres, mais la suite reste très étroite. Alors nous nous reportons sur sa voisine. Le passage est gros comme le poing, mais on distingue un agrandissement. Il nous faudra 2 bonnes séances à 3 pour parvenir à franchir ce premier obstacle.
La première étroiture de la cueva del Circo. Au départ, le passage était gros comme le poing.
Derrière c’est effectivement plus grand, mais sur 5 m seulement, car un second passage bas se présente. Nouveau chantier. Le conduit prend la forme d’un méandre étroit. Encore une étroiture et finalement à la 3° sortie, nous avons enfin le sentiment d’avoir franchi la zone difficile. Normalement, le conduit devrait s’enfoncer dans le banc calcaire sous-jacent, mais contre toute attente, celui-ci se maintient dans une alternance de grès et de marnes en suivant le pendage. Les dimensions restent pour le moins étriquées.
Ressaut dans la cueva del Circo.
Les étroitures s’enchaînent et l’une d’elles nécessite même l’aide de quelques pailles. Derrière, un puits, ou plutôt un ressaut, nous laisse croire un moment que nous allons enfin descendre dans la série. Mais 5 m plus loin, il faut remonter au sommet du méandre, et à nouveau ramper, casser pour progresser en suivant le courant d’air qui ne cesse de nous narguer. Le plafond s’abaisse et ça se gâte rapidement mais heureusement une lucarne nous permet d’accéder à un puits correspondant à la confluence du conduit principal avec un petit méandre pouvant être en relation avec la grotte voisine. Mais cela n’améliore pas pour autant la progression puisqu’il faut à nouveau avancer, la massette à la main. Lors d’une ultime sortie (la cinquième !) nous grignoterons encore une centaine de mètres jusqu’à des passages plus étroits et boueux de surcroît. C’en est trop et notre rêve de collecteur s’évapore avec un goût très amer compte tenu de toute l’énergie dépensée pour seulement quelques 200 m de galerie (-40 m).
Recherches vers Bucebrón et Buzulucueva
- La torca de la Rana Perdida
Nous avions découvert ce gouffre en février dernier. Une désobstruction à -4 m avait permis d’accéder à une succession de petits puits terminés par un colmatage à -54 m. Cependant, un étroit soupirail à -45 m avalait tout le courant d’air qui, cet été, était relativement fort. Nous y retournons en juillet, élargissons le passage et descendons un puits en gradins de 40 m. Une ultime désobstruction à -90 m se soldera par la découverte d’un P.12 entièrement bouché à -110 m.
Dans le même secteur plusieurs trous aspirants ont été ouverts mais sans résultat notable.
En face, sur l’autre versant de Bucebrón, nos travaux dans la torca de la Niebla Negra nous ont amenés à -170 m au sommet d’un puits étroit qu’il faudra agrandir. Il y a de l’air, de l’eau, mais les dimensions restent modestes pour le secteur. Affaire à suivre.
- Les premiers puits de la torca de la Niebla sontcreusés dans un alternance de couches à dominante gréseuse.
A - 135 m, on retrouve les calcaires urgoniens dont la puissance peut atteindre 400 m d'épaisseur.
Juste en bas, nous avons repris la désobstruction d’un trou fortement souffleur découvert par le S.C.Paris en 1988. C’est sans doute un travail de longue haleine, mais, les jours de repos (!) nous avons bien apprécié de travailler dans ce trou proche de la route, climatisé à moins de 10° quand il faisait plus de 30° à l’ombre…
Gros chantier en perspective sur le souffleur de Bucebron
En aval du réseau de l’alto de Tejuelo, l’étau se resserre…
Nous ne reviendrons pas sur la jonction entre le Pasillo et l’aval de Cantu (voir article précédent sur le blog). Mais non loin de là, deux autres prétendants attendent leur tour.
Dans les puits d'entrée de la torca Aitken
La torca Aitken est un maillon majeur en aval du réseau. Des recherches vers l’ouest, en amont de la cavité, ont permis de découvrir quelques prolongements qui portent le développement à près de 8 km. Il reste de nombreux départs à voir et outre une jonction, il serait très intéressant de pouvoir poursuivre l’exploration en aval, en direction du fond du collecteur de la Canal et de la Cayuela.
Plus modeste avec ses 2 km, la torca del Maxou Picchu, s’est rapprochée de galeries connues. Il y a là aussi de la jonction dans l’air….
Dans les grandes galeries de la torca Aitken
Ce tour d’horizon ne serait pas complet si on omettait de mentionner le temps passé sur des cavités plus modestes, les longues heures à arpenter les lapiaz, le GPS à la main pour localiser d’anciennes cavités n’existant plus que dans la bibliographie. À la fin de l’été 2012, notre inventaire « Porracolina » compte 1745 références.
Participants : G. Aranzabal, P. et S. Degouve, L. Guillot, J. Lopez Jorde, J.N. Outhier, B. Pernot, G. et M. Simonnot.
Compte rendu : P. Degouve et G. Simonnot